i am a [quasi-anagram]

Guillaume Appolinaire - Enfance [Poetry]

Le saint de ce jour m'a rappelé ce poème de l'auteur éponyme :

Enfance

   

    Au jardin des cyprès je filais en rêvant,
    Suivant longtemps des yeux les flocons que le vent
    Prenait à ma quenouille, ou bien par les allées
    Jusqu'au bassin mourant que pleurent les saulaies
    Je marchais à pas lents, m'arrêtant aux jasmins,
    Me grisant du parfum des lys, tendant les mains
    Vers les iris fées gardés par les grenouilles.
    Et pour moi les cyprès n'étaient que des quenouilles,
    Et mon jardin, un monde où je vivais exprès
    Pour y filer un jour les éternels cyprès.

Guillaume Apollinaire (1880 - 1918)

 

Vincent van Gogh - Champ de blé avec cyprès (1889)

Souls and rain-drops - Sidney Lanier [Poetry]

 

Source image wikimedia.org

Souls and rain-drops - Sidney Lanier

Light rain-drops fall and wrinkle the sea,
Then vanish, and die utterly.
One would not know that rain-drops fell
If the round sea-wrinkles did not tell.

So souls come down and wrinkle life
And vanish in the flesh-sea strife.
One might not know that souls had place
Were't not for the wrinkles in life's face.

Les âmes et la pluie - Sidney Lanier 

Gouttes de pluie ridant la mer,
S'évanouissent et disparaissent.
Nul ne saurait leur chute amère
Sans ces rides sur l'eau qui naissent.

Tombent les âmes ridant la vie
Mourant dans la chair des abysses.
Nul ne saurait son âme ici
Si son visage restait lisse.

[Encore une fois, un essai d'adaptation plutôt qu'une tradiction littérale. Le français est une langue plus "longue" que l'anglais, respecter la brièveté des vers est malaisé.]

 

Source image www.cornerale.com

Ben Doyle - Weathers [Poetry]

Ben Doller [Doyle] (né en 1973)

 

Ben Doyle est né à Warsaw, dans l'état de New York, en 1973. Ses poèmes ont été publiés dans the Boston Review, Tin House, Fence, et The New Republic. Son premier livre, Radio, Radio, a gagné le prix Walt Whitman en 2000. Il a récemment transformé son patronyme de Doyle en Doller par combinaison de son nom avec celui de son épouse Sandra Miller.

 

 

Weathers

It's freezing in the desert but there's nothing there to freeze.
The ground slides & swells. Where have you been buried?

Under which dune did you say? In the morning winter leaves.
Hush I can hear the aphids aphony & almost a word in the wind.

Time. Shovels. I'm late. I'm latent. I lost my list.
It was only "difference." Hailstone a lodestone on a leather lace.

Is there a certain lack of polarity? Is it family? Here I am.
In the cold moon's blast zone on clean sand & up is the deep murk.

Up licks my foreign shores. Tide of light. Hailstone beckoning
me to the brown ground. Something there, deep in the drift.

It's a piece of snow. Where have you been buried oasis,
O trace H2O? Hush already I can see evening leaving.

Atop this cactus the bees are hibernating. Hush they are dreaming
their communal dream, nothing. Sweet dreams. A storm took you here.

Your hive of snakeskins & spiny things. Sweet dreams bees.
Every morning winter ferments. Agent my eyes. May the bulb

of winter be planted deep enough not to burn may the blossom
return may the pollen swell & slide may the nectar mollify

*

There once was a hole in a stone.
Try as we might we could not see
to the other side. I put my
hand in the equator. It was
wet & quite warm. I placed my toe,
my leg, in the glazed equator.
My clothes listed from a brassy
hook in the wooden tie upright
in a stone. The air much cooler
now than the equator. My hips
slipped into the flat line of the
equator. You basking under
your tiara of succulents
on a stone, toying with a stone.
My red beard spread on the skin of
the equator. I drank of the
equator. The salt in that line.
I lowered my brain into the
planar equator. You began
to slide & swell above my sure
face, calcified, the equator.
I love you I hummed I can't swim

*

1) Take an orb, fallen into your habitat.
2) Slice an orb in two equal domes.
3) Take a leather line (a shoelace or such).
4) Place a line between two such equal domes.
5) Make an orb, product of your habitat.
6) Vice it by hand 'til it is compact & good.
7) Wake. The concussion of summer, searing the shadows.
8) Pace & watch for weather while the stone
9) slakes far beyond its molten core.
10) Chase the lodestar all (summer) day

*

Hush I think now I may
be the future:—

me well & working
at the technology hut,

you floating in a tall,
complimentary glass

beneath our domes
biogeodesic,

springing & falling
the same thing,

only difference, poolside—
our chair giving & low.

 

Temps

Il gèle dans le désert mais il n'y a rien à geler là-bas.
Le sol glisse & gonfle. Où as-tu été enterré ?

Sous quelle dune dis-tu ? Dans le matin l'hiver s'en va.
Chut, je peux entendre l'aphonie des pucerons & presque un mot dans le vent.

Temps. Pelles. Je suis en retard. Je suis latent. J'ai perdu ma liste.
C'était seulement "la différence". Grêlon, un aimant naturel sur un lacet en cuir.

Y a-t-il un certain manque de polarité ? Est-ce que c'est familial ? Me voici.
Dans la zone d'explosion de la lune froide sur le sable propre & l'obscurité profonde est en haut.

Le haut lèche mes rivages étrangers. Marée de lumière. Grêlon m'appelant
 à la terre brune. Quelque chose là, profondément dans le flux.

C'est un morceau de neige. Où as-tu été enterrée, oasis.
O trace  d'H2O ? Chut, je peux déjà voir le départ du soir.

En haut de ce cactus les abeilles hibernent. Chut, elles rêvent
leur rêve communautaire, rien. Doux rêves. Une tempête t'a pris ici.

Votre ruche de peaux de serpent & de choses épineuses. Doux rêves, les abeilles.
Chaque matin l'hiver fermente. Pour agent mes yeux. Puisse le bulbe

d'hiver être planté assez profondément pour ne pas brûler puisse la fleur
revenir puisse le pollen gonfler & glisser puisse le nectar apaiser

*

Il était une fois un trou dans une pierre.
Fais comme si nous pouvions ne pas voir
de l'autre côté. J'ai mis ma
main dans l'équateur. C'était
humide et assez chaud . J'ai mis mon orteil,
ma jambe, dans l'équateur vitreux.
Mes vêtements rangés sur un crochet
cuivré dans la traverse en bois tout droit
dans une pierre. L'air beaucoup plus froid
maintenant que l'équateur. Mes hanches
ont glissé dans la ligne plate de
l'équateur. Toi te chauffant sous
ton diadème de plantes grasses
sur une pierre, jouant avec une pierre.
Ma barbe rousse s'étalant sur la peau de
l'équateur. J'ai bu de
l'équateur. Le sel dans cette ligne.
J'ai baissé mon cerveau dans
l'équateur plat. Tu as commencé
à glisser & à gonfler au-dessus de mon visage
assuré, calcifié, l'équateur.
Je t'aime ai-je fredonné je ne peux pas nager

*

1) Prends une orbe, tombée dans ton habitat.
2) Tranche une orbe en deux dômes égaux.
3) Prends un lien de cuir (un lacet de chaussure ou autre).
4) Mets une ligne entre les deux dômes ainsi égaux.
5) Fais une orbe, produit de ton habitat.
6) Serre-le avec la main jusqu'à ce que ce soit compact & bon.
7) Éveille-toi. La commotion de l'été, desséchant les ombres.
8) Fais les cent pas & observe le temps tandis que la pierre
9) s'éteint loin au-delà de son cœur fondu.
10) Poursuis l'étoile polaire tout le jour (d'été)

*

Chut je pense maintenant que je peux
être le futur :-

Moi bien et travaillant
à la hutte technologique,

Toi flottant dans un grand,
verre gratuit

Au-dessous de nos dômes
biogéodesiques,

Bondissant et tombant
de la même façon,

La seule différence, le bord de la piscine -
notre chaise flexible et basse.

 

Emily Jane Brontë - Fall, leaves, fall [Poetry]

 

L'automne commence aujourd'hui, prenant la place d'un saint au calendrier. Automne selon la date, donc, sinon selon la météo. Pour ce 23 septembre, j'ai essayé d'adapter un poème d'Emily Jane Brontë, soyez indulgents.

 

source image : www.astuces.bettybossi.ch

 Fall, leaves, fall

 Fall, leaves, fall; die, flowers, away ;
 Lengthen night and shorten day ;
 Every leaf speaks bliss to me
 Fluttering from the autumn tree.

 I shall smile when wreaths of snow
 Blossom where the rose should grow ;
 I shall sing when night's decay
 Ushers in a drearier day.

 Emily Jane Brontë

 

Tombent les feuilles d'automne

Tombent les feuilles, meurent les fleurs ;
Longue est la nuit, court est le jour ;
Les feuilles parlent de bonheur
Sur l'arbre roux, tremblant autour.

Je sourirai lorsque la rose
Laissera la place aux couronnes,
Chanterai quand la nuit morose
Amènera un jour plus morne.

 

[Pas une traduction littérale, plutôt une tentative d'adaptation en respectant presque la rime. Et impossible de respecter les sept pieds, j'ai dû passer à huit... ]

Lisel Mueller - Moon Fishing [Poetry]

Source image : lakewashingtonmn.com

 

Moon Fishing

When the moon was full they came to the water.
some with pitchforks, some with rakes,
some with sieves and ladles,
and one with a silver cup.
 
And they fished til a traveler passed them and said,
"Fools,
to catch the moon you must let your women
spread their hair on the water --
even the wily moon will leap to that bobbing
net of shimmering threads,
gasp and flop till its silver scales
lie black and still at your feet."
 
And they fished with the hair of their women
till a traveler passed them and said,
"Fools,
do you think the moon is caught lightly,
with glitter and silk threads?
You must cut out your hearts and bait your hooks
with those dark animals;
what matter you lose your hearts to reel in your dream ?"
 
And they fished with their tight, hot hearts
till a traveler passed them and said,
"Fools,
what good is the moon to a heartless man?
Put back your hearts and get on your knees
and drink as you never have,
until your throats are coated with silver
and your voices ring like bells."
 
And they fished with their lips and tongues
until the water was gone
and the moon had slipped away
in the soft, bottomless mud.

Lisel Mueller

 

Pêcher la lune

 Quand la lune fut pleine ils partirent vers l'eau,

qui avec une fourche, qui avec un râteau

qui avec une passoire, qui avec une louche

et qui une tasse en argent.

Et ils pêchèrent jusqu'à ce qu'un voyageur passe et leur dise,

"Imbéciles,

pour attraper la lune il suffit de laisser vos femmes

étendre leurs cheveux sur l'eau

aussi maligne soit-elle, la lune se fera prendre

à ce filet miroitant,

dansant à perdre haleine jusqu’à ce que ses écailles d'argent

tombent à vos pieds, noires et immobiles .".

Et ils pêchèrent avec les cheveux de leurs femmes

jusqu'à ce qu'un voyageur passe et leur dise,

"Imbéciles,

croyez-vous attraper si aisément la lune

avec des fils de soie brillants ?

C'est vos coeurs que vous devez couper

pour amorcer vos lignes avec ces sombres animaux

que vous chaut de perdre votre coeur si c'est pour gagner votre rêve ?"

Et ils pêchèrent avec leurs coeurs noués et chauds

jusqu'à ce qu'un voyageur passe et leur dise,

"Imbéciles,

À quoi pourrait donc bien servir la lune pour un homme qui n'aurait plus de coeur ?

Reprenez-les et mettez-vous à genoux

et buvez comme jamais vous n'avez bu,

jusqu'à ce que vos gorges se couvrent d'argent

et que vos voix sonnent comme des cloches."

Et ils pêchèrent avec leurs lèvres, avec leurs langues

jusqu'à ce qu'il n'y ait plus d'eau

et que la lune glisse

dans la boue profonde et douce.

 

Chanson - Saint-John Perse [Poetry]

 Source image ffffound

 

CHANSON

 

Mon cheval arrêté sous l'arbre plein de tourterelles, je siffle un sifflement si pur, qu'il n'est promesses à leurs rives que tiennent tous ces fleuves. (Feuilles vivantes au matin sont à l'image de la gloire)...

 

Et ce n'est point qu'un homme ne soit triste, mais se levant avant le jour et se tenant avec prudence dans le commerce d'un vieil arbre,
appuyé du menton à la dernière étoile,
il voit au fond du ciel de grandes choses pures qui tournent au plaisir.

 Mon cheval arrêté sous l'arbre qui roucoule, je siffle un sifflement plus pur...
Et paix à ceux qui vont mourir, qui n'ont point vu ce jour.
Mais de mon frère le poète, on a eu des nouvelles. Il a écrit encore une chose très douce. Et quelques-uns en eurent connaissance.

 

Saint-John Perse

 

(Merci José de m'avoir remis ce texte en mémoire :)) ...)